Les propos tenus par le Directeur Général de la Police Nationale,(DGPN) ont déclenché un tollé au sein des institutions judiciaires, suite à l’incarcération d’un agent de la BAC de Marseille, soupçonné d’avoir commis des violences sur un jeune homme en marge des manifestations en soutien à la famille de Nahel, tué lors d’une interpellation.
Deux juges sont intervenus: l’un a mis le fonctionnaire en examen, l’autre a ordonné le placement en détention.
- La mise en examen.
Suite à l’ouverture d’une information judiciaire, le juge d’instruction a mis en examen le policier (et trois autres fonctionnaires) pour violences volontaires commises en réunion par personne dépositaire de l’autorité publique (PDAP) ayant entraîné une ITT supérieure à huit jours, en présence d’éléments graves ou concordants permettant de soupçonner que cette personne soit l’auteur de cette infraction.
A l’issue de cette mise en examen le juge d’instruction a saisi un autre magistrat aux fins de placement (ou non) en détention provisoire.
- Le placement en détention provisoire.
C’est le juge des libertés et de la détention (JLD) qui décide du maintien en liberté ou placement sous contrôle judiciaire, Assignation a résidence sous surveillance électronique ou placement en détention provisoire.
A l’issue d’un débat contradictoire, trois policiers ont été placés sous contrôle judiciaire, et seul ce fonctionnaire a été placé en détention provisoire, c’est à dire avant toute décision de renvoi (ou non) devant une juridiction de jugement.
Ce mandat de dépôt est ordonné pour 4 mois en matière correctionnelle, renouvelable 3 fois pour la même période a l’issue d’un débat sur la prolongation éventuelle de la détention.
Le détenu peut déposer des demandes de mise en liberté à tout moment.
Le juge des libertés et de la détention qui a ordonné ce placement en détention provisoire, a jugé conformément aux dispositions de l’article 144 du code de procédure pénale, comme il le fait à l’occasion de tout débat contradictoire sur la détention provisoire.
- Les critères du placement en détention provisoire.
La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s’il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu’elle constitue l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d’assignation à résidence avec surveillance électronique :
1° Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ;
2° Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;
3° Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices ;
4° Protéger la personne mise en examen ;
5° Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ;
6° Mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement ;
7° en matière criminelle, mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public provoqué par la gravité de l’infraction, les circonstances de sa commission ou l’importance du préjudice qu’elle a causé. Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l’affaire.
En pratique, donc, la détention provisoire peut être rendue nécessaire pour la réalisation d’un seul de ses objectifs, ce qui en facilite la motivation.
Par ailleurs, cette motivation des ordonnances de placement en détention prend souvent l’allure une formulation systématique, voire imprécise.
C’est donc uniquement à la lecture de l’ordonnance de placement en détention provisoire, qu’il est possible de savoir quelle a été la motivation exacte, permettant d’écarter les solutions du contrôle judiciaire ou de l’assignation à résidence sous surveillance électronique(ARSE).
Il est toujours possible d’interjeter appel de cette ordonnance lorsqu’elle est peu ou pas motivée, ou s’il existe un vice dans la procédure.
Les critères de l’article 144 s’applique à tous, l’avocat devant toujours rappeler que la liberté est le principe, la détention, l’exception.
Ce fonctionnaire de police a éprouvé l’application rigoureuse de l’article 144 du Code de Procédure Pénale comme tout mis en examen, bénéficiant par ailleurs, au même titre que les autres, de la présomption d’innocence.
Le ministre de l’intérieur a annoncé qu’une réflexion serait menée sur une éventuelle réforme de l’article 144 du CPC pour contourner ses critères lorsqu’il s’agira de mettre en détention provisoire un fonctionnaire de police.
Le Président de la République s’est positionné officiellement sur ces propos, à la demande insistante des syndicats de magistrature formulant clairement que nul n’est au-dessus des lois.
Cela devrait donc concerner un fonctionnaire même sans casier judiciaire, et a fortiori dans l’exercice de fonctions de police.